Bach-Akademie

Bach-Akademie ©Wieser
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Allegro ma troppo !

Pour son concert en hommage à Bach, le Festival d'Innsbruck a mobilisé l'un des cadres les plus prestigieux de la capitale tyrolienne. La Riesensaal (Salle des Géants) de la Hofburg est en effet la plus monumentale pièce d'apparat du palais impérial situé au cœur de la vieille ville. L'impératrice Marie-Thérèse l'avait aménagée pour accueillir les portraits de la nombreuse descendance née de son union avec François-Etienne de Lorraine, qui l'ornent du sol au plafond. Dans ce cadre exceptionnel, l'interprétation de pièces pour violon de Johann Sebastian Bach et d'une symphonie de Carl Philipp Emanuel Bach, confiée à des musiciens dont la réputation n'est plus à faire (l'Akademie fur Alte Musik Berlin, avec Isabelle Faust en solo), s'annonçait des plus prometteuses.

Et de fait l'Ouverture N°2 débute sur une belle démonstration de virtuosité, qui s'appuie sur un rythme enlevé. Les attaques sont précises et parfaitement coordonnées, le tuilage des notes irréprochable, tandis que le moelleux des cordes emplit la salle. La célèbre Badinerie finale s'envole à un rythme étourdissant, qui nuit toutefois quelque peu à son expressivité. Dans le Concerto pour violon et orchestre BWV 1042 Isabelle Faust nous régale encore de brillants solos, repris par l'ensemble des violons toujours impeccablement emmené par Bernhard Forck.

Mais ce parti pris de virtuosité, cette rapidité ont à notre sens le tort de lasser assez rapidement l'auditoire, faute de laisser à la partition le temps de développer ses effets. A la reprise après l'entracte, le Concerto pour violon et orchestre BWV 1041 met crûment en exergue les limites et les faiblesses de ce choix. De fâcheux décalages se produisent dans l'Allegro introductif comme dans l'Allegro assai final, et l'Andante prend une allure d'allegro, auquel les attaques très rugueuses de l'ensemble violons ôtent irrémédiablement toute ligne mélodique. Une telle approche virtuose et rapide pouvait paraître plus appropriée pour la Symphonie en si mineur de Carl Philipp Emanuel. Mais là encore les attaques trop appuyées nuisent largement à la ligne orchestrale, et ce malgré une exécution cette fois techniquement irréprochable.

Le Vivace du Concerto pour deux violons et orchestre en ré mineur s'accorde à peu près de ce rythme très rapide, et le Largo parvient à développer sa mélodie. On retrouve toutefois dans l'Allegro final ces fâcheux décalages que ne saurait excuser le rythme endiablé imprimé à cette partie. Notons toutefois que le public n'a manifestement pas partagé nos réserves, accueillant l'issue du concert par de chaleureux applaudissements envers les instrumentistes, et suscitant un bis sur un court extrait de Vivaldi. Regrettons une fois de plus que ce parti de rapidité ait quelque peu occulté le talent et la capacité expressive d'Isabelle Faust au violon.



Publié le 01 sept. 2017 par Bruno Maury