Bach en Combrailles - Orchestre National d'Auvergne

Bach en Combrailles - Orchestre National d'Auvergne ©
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Invitation au voyage

L’Orchestre National d’Auvergne est un ami fidèle de très longue date du festival Bach-en-Combrailles, voire même depuis toujours. Cet après-midi, le concert marquant cette annuel retrouvaille prend place en ville, dans le beau petit casino-théâtre Bel Epoque de Châtel-Guyon, ville thermale en périphérie de Clermont-Ferrand. Sous la direction de la jeune cheffe Chloé van Soeterstède, l’ensemble à cordes présente un programme assez éloigné de la programmation habituelle du festival. Si l’on comprend aisément qu’il soit important pour Bach en Combrailles de collaborer avec l’institution auvergnate, force est d’avouer que celle-ci n’a pas vraiment fait l’effort de proposer un programme très cohérent. L’auditeur est donc invité à explorer quatre œuvres de quatre compositeurs de quatre époques différentes et de quatre pays différents, avec chacun leur propre histoire et leurs propres couleurs. Invitation au voyage ? Pourquoi pas…

Felix Mendelssohn avait tout juste douze ans lorsqu’il composa la Sinfonia pour cordes n°1. Si ce fut en partie un exercice pédagogique pratique, le rendu est déjà d’un grand intérêt musical. Il permet d’apprécier immédiatement les qualités de l’Orchestre national d’Auvergne, à savoir un son d’ensemble très homogène, d’une pâte moelleuse et très propre, variant avec finesse toute une palette de couleurs, contrastée mais sans jamais de brutalité. La direction de Chloé van Soeterstède, très figurative, se montre fort sensible aux gestes musicaux, aux accents, aux changements de couleurs et aux moindres détails. Si sa gestuelle se fait vive et élégante, on aimerait également la voir dans un répertoire dont le discours nécessite un véritable souffle de part en part, pour s’assurer de sa consciente globale d’une œuvre. Sa présence parfois malicieuse fait parfois preuve de gestes intéressants dans sa manière de proposer certaines conduites de phrasés et d’aborder certaines cellules expressives, d’où ressort un relief pertinent.

Le Concerto pour violoncelle n°1 de Camille Saint-Saëns est l’occasion d’entendre en soliste le violoncelliste Jean-Marie Trotereau, premier violoncelliste de l’orchestre depuis 1985. Dès le premier mouvement Allegro non troppo, il fait entendre un instrument présent et virtuose, qui manque néanmoins de brillance, surtout dans les aigus. Sans doute une longue carrière d’orchestre et de musique de chambre impose-t-elle un timbre plus moelleux. Par contre, ses graves sont particulièrement séduisants, d’un grain de son agréablement profond. Le deuxième mouvement Allegro con moto est très charmant, l’orchestre proposant une couleur à demi-teinte, à la pointe de ses archets, sur lequel le violoncelle peut chanter avec un lyrisme retenu. Les nuances pianissimo proposées dans le troisième mouvement Molto allegro, juste avant la cadence passionnée, sont également très belles.

Il est très souvent très intéressant de proposer de découvrir une œuvre contemporaine, mieux encore d’Outre-Atlantique. Cette recette d’inviter le public à explorer et à ouvrir ses horizons a souvent été suggérée au début des années 2000. Toutefois, la programmation du jour s’éloignant déjà beaucoup de celle du festival baroque, on peut légitimement se questionner quant à la cohérence de Starbust de la compositrice Jessie Montgomery dans le concert de ce soir. Certes, le travail cellulaire encourageant les changements fréquents de mesures, la richesse de la recherche d’alliage des timbres et des différents jeux des instruments font que cette œuvre – qui n’est néanmoins pas un chef-d’œuvre représentatif de la musique étasunienne – ne manque pas d’intérêts. La direction de Chloé van Soeterstède se montre d’ailleurs très adéquate pour ce répertoire.

Le concert se termine avec la jolie Suite pour cordes de Leoš Janáček, avec de toujours très belles couleurs, notamment le premier Adagio en sourdines et sans basses ou encore le second Adagio, très beau mouvement qui permet d’entendre de nouveau un appréciable solo de Jean-Marie Trotereau. Le public salue les artistes avec reconnaissance, sans forcément réclamer un bis. De toute façon, quand le public commence à peine à se lever, l’orchestre est déjà parti…



Publié le 18 août 2021 par Emmanuel Deroeux