Orgue - Axel de Marnhac

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« L’enfant du pays » salué par les combraillais

Ce midi, sur l’orgue de Pontaumur, les festivaliers de Bach-en-Combrailles entendent un tout jeune musicien qu’ils connaissent pourtant déjà bien : Axel de Marnhac, qui n’a pas encore fêté ses 18 ans, est l’organiste officiel de ce même orgue, y officiant depuis 2012 ! Ayant appris sur cet instrument et y travaillant très régulièrement, il en possède une connaissance solide. On peut se permettre un parallèle avec Jean-Sébastien Bach (1685-1750) qui prit poste sur l’orgue d’Arnstadt, dont celui de Pontaumur est la restitution fidèle, lorsqu’il avait également 17 ans.

L’audition débute par la Toccata en ré mineur de Dietrich Buxtehude (1637-1707), auprès duquel Bach avait passé quatre mois en 1705, qui changèrent catégoriquement son style d’interprétation et d’improvisation. L’œuvre est enchaînée avec la Fantaisie en do mineur de Jean-Sébastien Bach, ce qui prouve le lien stylistique fort entre les deux compositeurs. Axel de Marnhac y démontre son assurance technique, son touché propre, la fluidité de son discours musical et sa conscience de la fonction de chaque voix au sein de la polyphonie. Le public ne peut également qu’être admiratif de l’agilité de son jeu de pédalier et sa maîtrise des registres de l’orgue, en utilisant une diversité de la palette de timbre avec cohérence et homogénéité. Tout se qu’il peut sans doute manquer encore est une plus grande assurance dans l’interprétation, en osant aller plus loin dans ses propositions musicales et développant une vision plus personnelle des œuvres qu’il exécute. Par exemple, ses rythmes légers et agiles pourraient gagner en caractère afin de convaincre entièrement le public.

Anthoni van Noordt (1619-1675) reste méconnu mais est pourtant l’un des représentants de l’école d’orgue néerlandaise, proche de celle de l’Allemagne du Nord dont Buxtehude est la figure principale. Ses Trois variations sur le Psaume 24 est sans doute son œuvre la plus jouée par les organistes. Composés pour familiariser les fidèles aux chants des psaumes genevois en 1659, on entend d’abord la main gauche et le pédalier converser sereinement tandis que le superius chante le choral ; la deuxième variation est un gai ornement du choral et la dernière fait dialoguer les parties en imitations tandis que le choral se retrouve joué avec autorité par le pédalier. Toute cette structure est très distincte dans l’écriture de van Noordt et sous les doigts d’Axel de Marhnac, dont l’objectif est dont toujours atteint 359 ans plus tard.

Le premier mouvement de la 6ème sonate en trio de Bach est délicieusement joyeux, malgré un jeu qui semble un rien pressé. Cela ne pose néanmoins aucun souci quant à l’agilité admirable du pédalier. L’Etude en forme de canon n°6 fait partie de la période de fascination de Robert Schumann (1886-1918) pour Bach – dans laquelle il écrira dans la foulée 6 Fugues sur B.A.C.H. L’interprétation d’une œuvre romantique sur cet instrument habitué aux couleurs du Baroque est un beau moment, malgré la difficulté. Enfin, l’organiste prodige fait sonner l’orgue de manière orchestrale avec le Prélude en sol majeur BWV 541. Si l’interprétation technique et musicale est superbe, il manque simplement encore que l’organiste prenne un plaisir plus fort encore pour qu’il puisse être partagé à son public. Celui-ci ne manque pas de l’applaudir chaleureusement et, évènement apparemment unique dans l’histoire des auditions du festival, en redemande. Axel de Marnhac cède et offre la fugue de la Toccata en do mineur de Bach. S’il l’on y souhaiterait toujours plus d’audace et d’espièglerie, on peut distinguer chaque entrée du sujet, essence même de toute la jouissance que procure une fugue. Le jeune et talentueux musicien étant à un moment charnière de ses études extra-musicales, le public ne manquera pas de le suivre avec grand intérêt.



Publié le 16 août 2018 par Emmanuel Deroeux