Stutzmann - Quella Fiamma : Arie Antiche

Stutzmann - Quella Fiamma : Arie Antiche ©Simon Fowler
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A Montpellier, Nathalie Stutzmann fait délirer le public de l'Opéra Comédie

Nous avons assisté dimanche 5 novembre dernier à l'Opéra Comédie de Montpellier, au premier concert de la contralto Nathalie Stutzmann depuis qu'elle y a été nommée, en septembre dernier, artiste en résidence. Depuis l'ère Koering (alors nommé surintendant de la musique montpelliéraine !) un certain nombre d'ensembles baroques se sont succédés : Christophe Rousset et les Talens Lyriques, Hervé Niquet et le Concert Spirituel puis Les Ombres. Une résidence pour un ensemble, consiste à présenter pendant au moins trois saisons, concerts, opéra(s), animations régionales, master classes,...

Le programme de ce concert, avant une tournée nationale et internationale, avait pour titre : Quella Fiamma : Arie antiche. C'est également celui du CD (Erato/Warner) qui vient tout juste de sortir. L'idée cachée derrière le titre de ce programme Arie antiche consiste à chanter uniquement des airs, glanés dans le répertoire des XVIIème et XVIIIème, en général italien mais publiés, entre 1885 et 1900, dans trois cahiers, par Alessandro Parisotti (1853 - 1913). La chanteuse a retrouvé quelques originaux dans les bibliothèques (partition, nom du compositeur original et date de création), et a cherché à les interpréter dans une orchestration, plus ou moins proche de celle de la création. Travail de longue haleine et assez conséquent, car Parisotti avait publié ces airs arrangées avec un accompagnement au piano seul et souvent avec erreur sur le nom du compositeur et/ou de l'œuvre dont il était issu. C'est sous cette forme que tout amateur du bel canto, dans le sens que l'on lui attribuait dans la première partie du XXème siècle, a pu entendre : les Freni, Pavarotti, Caballe, Berganza, Vargas et autres, chanter en début de récital quelques arie antiche... Un CD a été gravé, en 1992, par la regretté soprano Emma Kirkby, l'une des chanteuses pionnière du « renouveau baroque », avec ce même titre, mais ne contenant malheureusement que quelques airs du XVIIème.

L'idée de Nathalie Stutzmann de construire et présenter un programme cohérent, après éventuelle transcription, mais d'après les originaux et de nous les donner dans la tessiture de sa voix très sombre. En alternant tour à tour puissance, délicatesse et générosité elle nous permet d'écouter ces airs, ou cantates, dans un contexte autre que celui pour lequel ils ont été composés. Entre ces compositions chantées, étaient, intercalés des extraits de divers concerti et sonates pour instruments, de la même époque. Force est de constater que le résultat (concert et CD associé) est un enchantement. La chanteuse dirige son ensemble, Orfeo 55, avec énergie mais tout en légèreté, et précision, avec un très beau son et une cohésion constante. Si tous les musiciens ont semblé particulièrement épatants, on notera la présence de quelques instrumentistes particulièrement en vue dans cet ensemble : le théorbiste Miguel Rincon (souvent sollicité pour les compositions du XVIIème), le bassoniste Michele Fattori ou encore le violoncelliste Patrick Langot.

Bien que Nathalie Stutzmann ait eu quelques surprenants problèmes de souffle dans l'air d'Alcina de Haendel Ah! mio cor schernito sei, l'air qui a donné son titre au spectacle Quella Fiamma, une cantate de Francesco Conti (1681 - 1732), en trois parties, pour voix et basse continue, a permis d'apprécier les graves abyssaux, vertigineux de la chanteuse, ici particulièrement à son aise. Autre moment fort, l'air de l'opéra Il Pompeo : O cessate di piagarmi, d'Alessandro Scarlatti (1660 - 1725) où l'on a pu goûter le souffle et la longueur de cette voix. En dernier bis l'air Plaisir d'amour de Jean-Paul-Egide Martini (1741 - 1816) qui faisait partie des cahiers de Parisotti, a ravi le public, qui tel le Bourgeois Gentilhomme ignorait connaître presque par cœur un air baroque (devenu un tube, depuis qu'Yvonne Printemps, Tino Rossi et d'autres, dont Brigitte Bardot, l'ont chanté).

Un concert rafraîchissant et agréable qui a enchanté les nombreux spectateurs présents et augure des prestations à venir de cette résidence, en espérant une hypothétique programmation d'un opera seria de Haendel...



Publié le 27 nov. 2017 par Robert Sabatier