Cantabile e suonabile - Guiseppe Tartini

Cantabile e suonabile - Guiseppe Tartini ©agOgique - Alessandra Galleron
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Lorsqu'on évoque le mot violon, la difficulté d'apprentissage de cet instrument est la première chose qui nous vient à l'esprit. Avant de se l'approprier et de maîtriser la technique, de nombreuses années sont nécessaires. Et encore, il n'est pas pour autant garanti de devenir un excellent violoniste!
A l'écoute du présent enregistrement consacré aux sonates de Guiseppe Tartini (1692-1770), la virtuosité de ce compositeur et violoniste s'impose sans hésitation. Cet homme, aux multiples visages - homme rangé, tantôt pieux, tantôt fougueux -, est de loin le violoniste le plus talentueux du XVIIIe siècle laissant derrière son sillage d'archet le non moins célèbre Antonio Vivaldi.
Tartini a fondé une école de violon en 1722 et a composé quelques 150 concertos et 200 sonates. Malgré sa virtuosité et sa prolixité, il restera dans l'ombre du Maestro Vivaldi.
En constante opposition, cette obscurité et cette lumière, si chères aux peintres du XVIIIe, nourrissent Tartini dans l'écriture de ses «piccole sonate» - «petites sonates» selon ses propres termes. Ces dernières alternent des passages cantabile - chantants, proche de la voix humaine - et suonabile, où le son est favorisé, mis en surbrillance. Tartini privilégie la mélodie, il mène une quête incessante dans l'expressivité, l'émotion.

La musique de Tartini doit s'apprivoiser pour se l'approprier. David Plantier s'aventure là où bien peu de musiciens osent... Il explore, découvre et partage avec les auditeurs cette musique élégante et profonde en restituant tous les affects, toutes les couleurs des sonates pour violon seul. Ce brillant violoniste occupe la place de premier violon de l'ensemble Le Concert d'Astrée, collabore avec le Concert des Nations de Jordi Savall et l'ensemble Café Zimmermann. Sa technique d'archet, sa parfaite maîtrise de l'harmonie servent avec honneur le maître oublié Tartini. Grâce à Dominique et Olivier de Spoelberch pour le prêt du magnifique violon de Giovanni Battista Guadagnini, daté de 1766, il rend ces sonates encore plus lumineuses. Il tire partie de la ligne mélodique dans les sonates pour violon solo. Le jeu cantabile permet une interprétation flexible en s'appuyant sur un phrasé soigné.
La Sonate XXV en ré mineur révèle une figure musicale fort intéressante dans ses mouvements, andante cantabile (piste 1), allegro (p. 2) et allegro assai (p. 3). La Sonate XXVIII en la majeur, quant à elle, adopte un rythme allant crescendo. L'adagio « La mia filli» (p. 7), moment d'intense émotion, laisse la place aux brillants allegro (p. 8) et presto (p. 9). La Sonate XXXI en mi mineur est toute autant fascinante par ses mouvements lents l'aria cantabile (p. 11) et le grave (p. 13). La virtuosité de Tartini, dans l'art du violon, se révèle dans la Sonate XXX en ré mineur.
Bien que le présent enregistrement se concentre sur des pièces à violon solo, deux sonates - numéro II en ré mineur et numéro VIII en sol mineur - sont jouées avec accompagnement d'un violoncelle tenu par Annabelle Luis. La présence de cette ligne de basse, en l'occurrence celle tenue par le violoncelle, peut être considérée comme l'héritage du passé et préfigure sa disparition...

Ce présent enregistrement est bel et bien un fort délicieux ouvrage, réunissant le compositeur de génie qu'est Guiseppe Tartini et David Plantier, son fervent disciple. L'art violonistique est poussé à son paroxysme. La splendeur de la technique d'archet est magnifiée par celle des harmonies, dans le seul et unique but: celui de l'expression et de l'émotion.



Publié le 03 avr. 2016 par Jean-Stéphane SOURD DURAND