Suites for Obeo - Marin Marais

Suites for Obeo - Marin Marais ©©Pierre-Etienne Bergeron
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La sonorité suave et scintillante du hautbois


Cet instrument a subi d'importantes modifications au cours de l'histoire musicale. A partir de 1650, les familles Hotteterre et Philidor, aux multiples facettes (facteurs d'instruments, compositeurs et musiciens virtuoses, membres de la Musique de la Chambre et de la Grande Ecurie du Roy) vont faire évoluer cet instrument. Ils vont le diviser en trois parties à savoir le corps du haut,le pavillon et le corps du bas. Ils abandonnent définitivement les pirouettes et les capsules au profit du contrôle de l'anche. Cette maîtrise exercée par les lèvres va permettre d'exprimer toutes les finesses et la rondeur du son, principe novateur face aux autres instruments de la famille.
En 1664, le surintendant de la Cour, Jean-Baptiste Lully, compose une marche pour ces nouveaux hautbois et les intègre à «La Grande Ecurie du Roy».
L'objet de ce présent enregistrement, les Pièces de viole composées à partir de 1686 par Marin Marais, se veut être une double rareté. La première réside dans le fait que ces pièces destinées à la viole sont interprétées au hautbois. L'autre n'est liée qu'à l'histoire de ses débuts. Malgré l'intérêt porté par de nombreux compositeurs, le hautbois ne se forge un réel répertoire qu'à partir d'Antoine Dornel avec sa Sonade pour hautbois en 1723.

Christopher Palameta, talentueux hautboïste, s'en saisit de manière brillantissime et les interprète comme de véritables suites pour hautbois et ce avec beaucoup d'élégance. Il imprime «son style» avec de nouvelles nuances de couleur et d'expression. Le premier pélude de la Suite en ut majeur marque une discrète inspiration. «Ecoutons» les doigtés de trille aux délicats appuis. Toujours de la même suite, l'attaque de la Courante se veut franche. La tenue du son dans la nuance est de belle qualité. La Sarabande reflète ici un caractère mélancolique démontrant la culture musicale sans faille de Palameta, mais également son excellente technique instrumentale dans ses détachés, liés, piqués. Le Prélude de la Suite en sol majeur se révèle pleinement dans un phrasé souple et homogène. Le hautboïste détermine et souligne avec une aisance innée l'agogique des phrases. La Gigue de la Suite en sol mineur est une des nombreuses démonstrations de la respiration alternée. La vitesse de prise d'air semble s'effectuer sans effort. Musicien hors pair et surtout brillant technicien, il est quasi impossible de distinguer les quelques doigtés de corrections de justesse. Une palette de couleurs chatoyantes envahit notre oreille grâce à l'interprétation de l'Allemande de la Suite en ré mineur dans laquelle le son est employé sur toute la tessiture demandée sans dégradation des nuances. Christopher Palameta est bien un des meilleurs hautboïstes du monde. Il est l'incarnation de la connaissance des harmoniques, du bisbigliando - trille de sonorités effectuée sur instruments à vent et changeant un peu la couleur et la justesse du son -, double trille, ralentis, accelerando, sforzendo, tenuto, etc.

Le hautbois apparaît donc comme un instrument mélodique où la rondeur du son doit prédominer sous peine de devenir nasillard, tel le bucolique canard au caractère pastoral bien marqué dans Pierre et le Loup de Sergueï Prokofiev. Le hautbois se révèle plein de tendresse avec son timbre voilé et ses nombreuses possibilités de jeu. Il personnifie la candeur, la douce joie ou bien l'immense douleur, Il les exprime à merveille dans le jeu cantabile. Ce fabuleux instrument trouve grâce dans des compositions de Joseph Bodin de Boismortier, Antonio Vivaldi, Tomaso Albinoni, Georg Philipp Telemann, Johann Sebastian Bach, Georg Friedrich Händel pour ne citer qu'eux.


N'hésitez pas un instant, procurez-vous cet enregistrement vu sa «rareté».



Publié le 19 mars 2016 par Jean-Stéphane SOURD DURAND