Intégrale - M. Weckmann

Intégrale - M. Weckmann ©Ricercar Outhere
Afficher les détails
« Non, Monsieur Bernhardt, la musique ne se taira pas »

Au fond de ce magnifique coffret repose toute l’œuvre d’une vie. Du moins celle qui a survécu à l’outrage du temps et à l’indélicatesse des hommes. Cette œuvre est celle d’un compositeur enfoui dans les replis des modes discographiques. Aujourd’hui méconnu, il était réputé, au milieu du XVIIème siècle, comme l’un des plus grands maîtres de la musique pour orgue. Mais, si l’orgue était son instrument de prédilection, le coffret composé par Ricercar a l’immense mérite d’éclairer d’autres genres musicaux dans lesquels Matthias Weckmann a révélé son génie musical.

Ce solide coffret renferme cinq CD. Sur les deux premiers sont gravées les œuvres relevant de la catégorie des « concerts spirituels ». Ces pièces sacrées sont interprétés par le Ricercar Consort et quatre excellents chanteurs solistes. Dans le second CD, il restait un espace suffisant pour enregistrer les « sonates orchestrales », une forme de musique de chambre à laquelle La Fenice redonne vie. Le troisième CD est totalement dédié aux compositions pour clavecin qui renaissent sous les doigts experts de Siebe Henstra. Dans le quatrième CD, le Ricercar Consort nous surprend d’abord avec neuf très courts lieder, avant de transmettre le relais à Bernard Foccroulle. Une partie importante du quatrième CD et l’intégralité du cinquième sont donc consacrés à l’œuvre pour orgue de celui qui fut, de 1655 à 1674, titulaire de l’orgue de l’église Sainte Catherine de Hambourg, orgue considéré comme l’un des plus beaux d’Allemagne.

Les douze « concerts spirituels » (huit sur le premier CD et quatre sur le second) sont apparentés à la grande famille des « motets » ou des « cantates ». Ils forment un bouquet musical d’une merveilleuse variété de couleurs, de tonalités et de rythmes. Chacun est doté d’un caractère singulier. Si l’un est empreint d’une tristesse résignée (Zion spricht/ Sion dit), un autre déploie une ardeur guerrière (Es erhub sich ein Streit/ Un combat se déclencha) quand un troisième s’abandonne à la quiétude du croyant soulagé par la miséricorde divine  Kommet her, zu mir/ (Venez à moi).

Toutefois, ils présentent tous un point commun : leur vocation à être interprété dans un cadre liturgique. Weckmann, fils de pasteur, a parfaitement assimilé la doctrine musicale luthérienne. Celle-ci privilégie l’intelligibilité des paroles, condition nécessaire à la compréhension des textes tirés des Ecritures. Elle encourage également la participation des fidèles au chant liturgique, pratique alors peu courante dans le culte catholique. Ces orientations ont probablement guidé le compositeur sur deux plans : mettre la musique au service du texte et lui assigner une fonction pédagogique.

La volonté de faire correspondre la musique au texte qui lui sert de support, s’inscrit déjà dans le projet développé par le mouvement Humaniste italien. Voici comment Gioseffo Zarlino en définit les termes : « Les notes musicales constituent le corps de la musique, et les paroles en sont l’âme. Et puisque l’âme (étant plus noble que lui) doit être suivie et imitée par le corps, ainsi les notes doivent suivre et imiter les paroles ». Cette orientation a donné naissance à un genre musical nouveau : le madrigal. Et du madrigal au « concert spirituel », il n’y a qu’un pas. Aussi, des musiciens comme Heinrich Schütz appliqueront-ils la philosophie générale du madrigal, non plus à des textes poétiques, mais à des textes sacrés. Weckmann se montrera un fidèle continuateur sur cette voie en marquant sa musique du sceau de l’expressivité. Trois exemples, parmi tant d’autres, suffiront à le confirmer. Le premier verset de la « cantate » Weine nicht (Ne pleure pas - L’Apocalypse, 5.5) débute de façon lente et plaintive pour changer soudainement de ton et de rythme lorsque James Bowman poursuit par un libérateur : es hat überwunden (il a vaincu). De même, dans la seconde pièce (Zion spricht (Sion dit - Isaïe, 49-14), c’est par des dissonances déchirantes qu’il signifie le tourment d’un fidèle craignant d’être abandonné par Dieu : der Herr hat mich verlassen (le seigneur m’a abandonné). Enfin, l’envolée des violons fait apparaître l’image d’une troupe joyeuse d’anges accompagnant Gabriel se présentant à Marie : Gegrüsset seist du, Holdselige (Je te salue, pleine de grâce - 1664). Dans toutes ces pièces, la prononciation est la condition de l’accès au sens pour une assemblée qui n’avait pas toujours l’usage du texte imprimé. De ce point de vue, les quatre voix solistes révèlent une maîtrise remarquable de la diction.

Weckmann connaît également l’importance de la pédagogie dans l’assimilation des enseignements. Il le démontre en employant, par exemple, la technique de la répétition. La cantate Wie liegt die Stadt (Comme la ville déserte - Lamentations de Jérémie, 1-1) en constitue une illustration. Greta De Reyghere entonne le premier verset, puis le découpe en segments qu’elle répète. La même méthode est appliquée à la suite du texte, avant de conclure par la reprise du premier verset, comme pour mieux l’imprimer dans la mémoire des fidèles. Weckmann utilise un autre procédé qui consiste à souligner un terme clé pour attirer sur lui l’attention des fidèles. Ainsi, dans la pièce intitulée Herr, wenn ich nur dich habe (Seigneur, si je n’avais que toi - Psaume 73, 25-26), il fait répéter aux solistes le terme nichts (rien d’autre) pour convaincre l’assemblée que « rien d’autre » que Dieu ne peut consoler une âme alanguie. Il introduit même une amorce d’effet théâtral lorsque, dans le Dialogo von Tobias und Raguel (Dialogue de Tobie et Raguel - Livre de Tobie, 7-1) et dans Gegrüsset seist du, Holdselige, la voix de l’Ange semble venir de loin puis se rapproche peu à peu de son interlocuteur.

Si la culture luthérienne est perceptible dans la plupart des « concerts spirituels », une écoute attentive de ces petits joyaux suggère d’autres sources d’inspiration. Ainsi, l’influence italienne ne fait pas de doute dans le récit Es erhub sich ein Streit (Un combat se déclencha - texte de Johann Christoph Demantius). L’explosion sonore, instrumentale et vocale, stylisant le combat de Saint Michel avec le Dragon, puise dans une veine déjà exploitée par Schütz, notamment pour la composition de certaines de ses Symphoniae sacrae. Et si Weckmann a été l’élève de Schütz, n’oublions pas que Schütz a beaucoup appris de Giovanni Gabrieli, puis de Claudio Monteverdi. Par ailleurs, la structure du Dialogo von Tobias und Raguel se rapproche de celle des Passions-répons que Johann Walther, ami de Luther, avait introduits en Allemagne. En l’occurrence, l’Ange assure ici la fonction que remplira l’Evangéliste dans les Passions-motets ultérieures. Nous nous plaisons à imaginer que le chœur final de ce dialogue a pu être repris en forme de turba (chœur de foule) par l’assemblée des fidèles. En fin de compte, les douze « concerts spirituels » dont la partition nous est parvenue, représentent un panorama assez large de la musique sacrée germanique du milieu du XVIIème siècle.

Ces pièces sont interprétées par des artistes en pleine maturité. Les instrumentistes soutiennent les chanteurs et les chanteurs glissent à la perfection sur les lignes mélodiques filées par les instrumentistes. A chacune des douze pièces correspond une distribution instrumentale spécifique, lui donnant ainsi une couleur qui n’appartient qu’à elle. Quant aux chanteurs, la clarté de leur timbre et leur maîtrise des nuances mérite d’être soulignée. Ces douze pièces nous ont subjugués.

Quittons maintenant l’univers chantant des « cantates » pour rejoindre le monde sonnant des « sonates ». En composant ses dix Sonates, Weckmann a-t-il tenté de se distraire de la rigueur et du sérieux que lui impose la doctrine musicale luthérienne ? Force est de constater qu’elles sont toutes d’un tempérament joyeux, parfois déluré et d’allure étrangement moderne.

Sur les dix Sonates, une seule se distingue par sa constitution singulière. En effet, la Sonata G-dur (sol majeur) est dominée par les cordes. Un premier violon annonce le thème mélodique d’un ton alerte, un second violon le relance avant que le troisième ne finalise le mouvement fugué, soutenu par l’orgue. C’est au terme de l’exécution de cette sonate que le Ricercar Consort passe le relais à l’ensemble La Fenice.

Pour les neuf autres Sonates, l’orchestration a été totalement modifiée: la présence des cordes se limite à un seul violon sommé de s’accorder avec trois instruments à vent (cornettino, trombone, basson), leur polyphonie étant soutenue par une basse continue (orgue ou clavecin, appuyé par un théorbe). Le livret fait remarquer « que ces quatre instruments sont ceux qui sont les plus utilisés dans les église italiennes depuis la fin du XVIème siècle ». Ces compositions de Weckmann, présentent bien des similitudes avec certaines Canzone de Gabrieli, celui-ci étant par ailleurs l’un des inventeurs du genre sonata di camera (sonate de chambre ».

Ces pièces se réfèrent toutes au même patron : la forme fuguée est omniprésente, mouvements lents et mouvements rapides se succèdent en de très courtes séquences, le final s’égaye en une joyeuse récréation ou dans une atmosphère paisible dans laquelle le contrepoint se résout dans une belle harmonie. Les instruments se répondent, parfois dans un beau jeu d’écho comme dans la Sonata D-dur (ré majeur) n° 7. Souvent, un instrument s’engage dans une course folle, bientôt poursuivi par les trois autres. Ainsi, dans la Sonata D-moll (ré mineur) n° 9, le basson s’élance dans un mouvement chromatique, suivi successivement par le trombone et le cornet ; après un bref moment de respiration, la course reprend, cette fois initiée par le violon. C’est de façon expressive que la Sonata G-Dur (sol majeur) n° 5 figure les différentes phases d’une bataille : l’engagement, la respiration, de nouvelles charges suivies de nouvelles respirations jusqu’au choc final qui se conclut par quelques notes mélancoliques refusant de désigner un vainqueur. Le rythme de ces compositions vives et concises (moins de cinq minutes pour la plupart) change à chaque phrase : à l’allégresse succède le repos, après les mouvements legato arrivent les rythmes syncopés, prémisses lointaines du jazz.

Les neufs tableaux musicaux à trois ou quatre parties, pourraient parfaitement servir de fond sonore aux peintures truculentes de Breughel le Jeune. Elles sont servies par de véritables virtuoses. Aucun instrument n’écrase l’autre et tous participent d’une même dynamique musicale. Jean Tubéry donne au cornetto ses lettres de noblesse car cet instrument fréquente peu les salles de concert. Jean-Jacques Herbin manie un trombone majestueux et le basson de Christian Beuse sait se montrer facétieux. Le violon de François Hernandez mène la danse quand le théorbe de Christina Pluhar bat le rythme de sa belle voix grave et que l’orgue ou le clavecin de Jean-Marc Aymes étoffe les parties de basse à partir desquelles pourront s’élancer les quatre solistes.

Avec les pièces de clavecin, nous pénétrons dans l’intimité des cours princières de Dresde et du Danemark comme dans celle des foyers bourgeois des villes de Lübeck et de Hambourg dans lesquelles Weckmann a officié. Toutes les pièces connues sont gravées sur le troisième CD. Elles se composent de six Toccatas, cinq Suites, cinq Canzone, une Partita et une variation sur un thème mélodique (Lucidor einst hütt der Schaf - Lucidor garde le mouton). A notre connaissance, aucun ordre, chronologique ou par espèce, ne règle leur succession sur le CD. Nous avons donc organisé leur écoute par genre.

Avec les Suites, nous posons le pied sur le terrain des danses auxquelles Louis Couperin avait déjà consacré nombre de ses compositions. La Suite h-moll (si mineur) est l’exemple-type de la structure adoptée par les éditeurs de Johann Jakob Froberger : une succession de danses traditionnelles alternent tempos lents et tempos rapides. Elle est la seule à être précédée d’une ouverture. Ainsi, un Prélude sobre se prolonge par une Allemande plus ornée, elle-même suivie par une Courante qui gagne encore en brillance ; vient ensuite une Sarabande s’abandonnant à une rêverie contrariée par une Gigue endiablée. Seule la Suite d-moll (ré mineur) suivra ce schéma. Dans les trois autres pièces, la Gigue s’impose au second rang, laissant le dernier mot à une Sarabande paisible. Chacune de ces pièces, toutes écrites sur le mode mineur, recèle des petits trésors sonores même si nous avons été particulièrement séduits par les inventions mélodiques de l’Allemande et de la Gigue de la Suite d-moll. Par ailleurs, à l’écoute de la Sarabande de la Suite a-moll (la mineur), la grande sarabande de Georg Friedrich Händel s’est rappelée à notre esprit. Enfin, une pièce singulière peut se glisser dans la catégorie des Suites. Il s’agit de la Partita Die Liebliechen Blicke (Les regards gracieux) composée, elle aussi, de quatre mouvements de danses. Elle annonce celles que composera Bach un demi-siècle plus tard.

Au contraire des Suites, les Toccatas ne sont contraintes par aucune unité mélodique ou rythmique. Elles offrent à l’exécutant l’occasion d’une démonstration de virtuosité. Ainsi, la Toccata e-moll (mi mineur) débute par un rythme lent, puis le tempo s’accélère et les ornements harmoniques s’empressent d’occuper l’ensemble de l’espace du clavier. De même, dans la Toccata C-dur (do mineur), la mélodie glisse d’arpèges en coulades dans une course effrénée des triples croches, des aigus vers les graves et inversement. Les Toccata Vel praeludium D-moll (ré mineur) et E-moll (mi mineur) paraissent mieux structurées. Si l’exercice de virtuosité reste constant, la ligne mélodique qui traverse la première est mieux dessinée quand des passages fugués font leur apparition dans la seconde. Ces six Toccatas fortement ornées, constituent des témoignages vivants d’un genre musical encore à la recherche de ses points d’équilibre à l’époque de Weckmann.

Avec les Canzone, nous cheminons vers les compositions destinées à l’orgue. Ainsi, la Canzon C-dur (do majeur) s’ouvre sur une fugue, suivie d’un simple développement qui s’échappe dans une cadence accélérée. Mais leur forme peut être plus élaborée. Ainsi, dans la Canzona G-dur (sol majeur), la fugue ouvrant la pièce est suivie d’un second mouvement dans lequel deux voix suivent un chemin parallèle avant de céder la place à un nouveau mouvement fugué. La Canzon C-moll (do mineur) nous paraît la plus aboutie, très proche du style des pièces d’orgue enregistrées sur le cinquième CD.

Ces pièces destinées au clavier sont interprétées avec une souplesse digitale remarquable par Siebe Henstra. Les ornements fusent, les nuances sont joliment marquées, les cadences irrésistibles. Ces dix-huit morceaux sont interprétés sur deux clavecins et un clavicorde, copiés d’instruments que Weckmann aurait pu toucher. La virtuosité de l’interprète et la qualité des instruments nous plongent ainsi dans un XVIIème siècle en pleine recherche de sonorités nouvelles. Nous regrettons cependant un certain manque d’homogénéité dans la prise de son. En effet, le clavicorde semble bien lointain quand nous avons une sensation de proximité à l’écoute des clavecins.

Sur le chemin qui nous mène vers les églises Sainte Catherine de Hambourg et Saint Maurice de Hollern pour entendre l’œuvre pour orgue de Weckmann, nous nous régalons de neuf courts lieder profanes transfigurés par le timbre limpide et pénétrant de Greta de Reyghere accompagnée par Siebe Henstra (clavecin), Philippe Pierlot (basse de viole) et Vincent Dumestre (théorbe). Ils ont été composés pour l’entourage du compositeur à l’occasion d’événements festifs (cérémonies civiles, fiançailles ou mariages), pour célébrer la beauté d’une reinweisse Herzogin (duchesse pure et blanche) ou en guise de déclaration d’amour à une belle Hambourgeoise. Ces perles musicales lumineuses sont d’une beauté rafraichissante. La poésie des textes est magnifiée par une mélodie d’une sobriété souriante, portée par un rythme gracieux.

Voici déjà que murmurent les premières notes de la transcription pour orgue du motet composé jadis par Johann Walter, sur des paroles de Luther : Gott sei gelobet und gebenedeit (Gloire et louange au Dieu secourable). Cette pièce résume à elle seule la variété des inventions mélodiques et des figures rythmiques qui donnent à la musique d’orgue de Weckmann son cachet propre : une première partie privilégie les ornementations qui fleurissent dans un dialogue entre le clavier et le pédalier quand la seconde, plus introspective, se structure autour d’une fugue interprétée sur deux claviers. Mais l’organiste n’est pas seulement à la recherche d’effets sonores. Même dans sa musique d’orgue, Weckmann est au service d’une foi. Ainsi, Es ist das Heil uns kommen her (le salut nous est venu) constitue une longue méditation d’une trentaine de minutes à partir d’un choral luthérien expliquant aux fidèles que le salut du péché ne peut venir que de la grâce de Dieu. Dès le départ, l’organiste campe les deux personnages : l’ampleur et la gravité des jeux de bourdons décrivent la majesté divine tandis que la fragilité des jeux d’anches définit l’Homme. Dans les six parties qui suivent, alternent des moments consacrés à la méditation et à la prière pour appeler à la miséricorde divine. Le compositeur réussit à associer l’élévation vers le sacré tout en conservant une proximité avec la condition humaine. La pièce s’achève par un magnifique plein-jeu d’action de grâce.

Au demeurant, le talent d’un organiste consiste également à mettre en valeur toutes les potentialités de l’instrument dont il est le titulaire. Les variations qui font la richesse de O lux beata trinitas (O lumière de la sainte Trinité) l’illustrent à merveille. Tour à tour solennels et recueillis, ils démontrent le savoir-faire du musicien dans le domaine de la composition et de la registration. Ces variations sont de toute beauté lorsqu’elles associent les valeurs longues d’un cantus firmus à l’élan joyeux de l’alto. Il en est de même avec la Canzona C-dur (do majeur) dont la radieuse ligne mélodique prolonge fort agréablement cette atmosphère teintée de jovialité. Dans un registre expressif plus sobre, la quatrième partie de Gelobet seist du, Jesu Christ (Loué sois-tu, Jésus Christ) confie à la basse la mélodie d’un choral apaisé quand les jeux de flûte s’ébattent dans les aigus. Parfois, il va jusqu’à oser des chromatismes et des dissonances surprenants, comme dans la troisième partie de Nun freut euch, lieben Christen g’mein (Réjouissez-vous, chère assemblée chrétienne).

La prise de son impeccable d’une interprétation magistrale, par Bernard Foccroulle, de l’œuvre pour orgue de Weckmann nous invite à la réécoute de ces pièces qui annoncent, mieux encore que les précédentes, les pages d’un Buxtehude ou d’un Bach.

Notre parcours musical s’achève sur un Magnificat radieux. Il nous aura permis de découvrir les multiples facettes du talent d’un compositeur tombé dans l’oubli. Il appartenait à la génération des passeurs qui, de transcriptions en transpositions et en assimilations, ont constitué le riche terreau musical germanique dont se sont nourris les générations suivantes, celles des maîtres du baroque allemand. Matthias Weckmann en était un représentant éminent, si l’on en croît l’éloge posthume que lui rend Christoph Bernhardt : « Ici, la musique va se taire » déplore-t-il après le décès de son ami intime et cofondateur du Collegium Musicum de Hambourg. Il pressentait certes le déclin prochain de sa cité comme centre musical d’importance. Mais le label Ricercar lui a finalement opposé un démenti éclatant : désormais, l’ensemble de l’œuvre de Weckmann retentira à tout jamais.



Publié le 24 sept. 2016 par Michel Boesch