L'Enlèvement au sérail - Mozart

L'Enlèvement au sérail - Mozart ©
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Le triomphe d'Osmin

Lors de la composition de L'Enlèvement au Sérail, Mozart n’avait que 26 ans et il s’apprêtait à se marier avec Constanze Weber. L’intrigue en est simple : le seigneur Belmonte doit aller délivrer sa fiancée Constance du sérail du pacha Selim (rôle parlé), où elle est gardée par l'eunuque Osmin. Blonde, la servante de Constance, est aussi prisonnière du pacha, de même que son promis Pedrillo, valet de Belmonte. Après bien des péripéties pour organiser une évasion, ils sont tous les quatre capturés, promis à la mort… Mais l'affaire se termine sur un coup de théâtre grâce à la bienveillance inattendue du Pacha !

Wajdi Mouawad n’avait mis en scène jusqu'à présent que des œuvres contemporaines. Il renouvelle ce classique mozartien en prenant la décision de réécrire les dialogues en français, puis de les retraduire en allemand. Cela se traduit notamment par l’ajout d’un prologue plutôt grotesque, mettant en scène une fête en l’honneur de Belmonte revenu du sérail, où des bourgeois s’amusent à frapper une « tête de turc » à l’image de Mahomet. Les dialogues rallongent la pièce, de sorte que le résultat n'est guère convaincant. Et certains ajouts, telle la prière au muezzin au début de l’acte II, entraînent la mise en scène vers la caricature : il ne faut pas confondre musulmans et Ottomans …

Les décors étaient plutôt sobres : des murs amovibles qui découvrent parfois un grand espace, une prison, puis une sphère grillagée pour représenter le « harem » du Pacha. Le choix des costumes oscille perpétuellement entre ancien et contemporain. Au final, nous ne savons pas vraiment dans quel univers Wajdi a voulu transposer cette œuvre, et l'exercice ne nous a guère convaincu.

Heureusement, la production pouvait s'appuyer sur une très bonne distribution, dirigée par un chef tout à fait à la hauteur de ce Singspiel exigeant. La direction de Stefano Montanari a été remarquable, précise, énergique, offrant aux chanteurs une base orchestrale solide pour exprimer leurs sentiments.

Parmi les rôles féminins, la Constance de Jane Archibald a fait montre d'une force et d'un caractère très marqués. Ce parti pris s'appuyait sur une belle voix puissante et virtuose, malgré quelques aigus stridents. Joanna Wydorska a campé une Blonde délicate mais néanmoins espiègle, d’une voix précise, juste et légère (trop parfois ?) que cela soit en solo ou en duo.

Cyrille Dubois a incarné un Belmonte élégant, avec une très belle voix pleine de contrastes, s’alliant parfaitement avec ses partenaires pour de magnifiques duos, trios et quatuors. Le Pedrillo de Michael Laurenz était correct, malgré quelques difficultés dans le Frisch zum Kampfe. Soulignons le magnifique Osmin de David Steffens, à la voix de basse profonde, puissante, et parfaitement maîtrisée. Son jeu de scène était convaincant, les sentiments délicatement exprimés… Il a été pour moi le personnage le plus attachant de cette soirée.

Le comédien Peter Lohmeyer a représenté un Pacha Selim touchant, parfaitement interprété, oscillant entre douceur et rudesse, jusqu'à la clémence finale.

Enfin le chœur de l’Opéra de Lyon a fait preuve d'une belle puissance dans ses interventions, avec des voix plutôt homogènes.

Publié le 12 juil. 2016 par Hippolyte Darissi