Giulio Cesare - Haendel
© Afficher les détails Masquer les détails Date: Le 12 oct. 2024
Lieu: Teatr Wok – Varsovie. Représentation donnée dans le cadre du XIIème Festival d’Opéra Baroque de l’Opéra de Chambre de Varsovie (Warszawska Opera Kameralna)
Programme
- Giulio Cesare
- Dramma per musica en trois actes de Georg Friedrich Haendel (1685-1759), sur un livret de Nicola Francesco Haym d’après Giacomo Francesco Bussani
- Créé le 20 février 1724 au Théâtre Royal Haymarket de Londres
Distribution
- Yuryi Mynenko (Giulio Cesare)
- Dorota Szczepańska (Cleopatra)
- Ray Chenez (Sesto)
- Joanna Motulewicz (Cornelia)
- Nicholas Tamagna (Tolomeo)
- Artur Janda (Achilla)
- Artur Plinta (Nireno)
- Łukasz Górczyński (Curio)
- Mise en scène : Włodzimierz Nurkowski
- Décors et costumes : Anna Sekuła
- Chorégraphie : Wioletta Suska
- Lumières : Paweł Murlik
- Multimédia : Adam Keller
- Direction du chœur : Krzysztof Kusiel-Moroz
- Orchestre Musicae Antiquae Collegium Varsoviense
- Direction : Adam Banaszak
Des instants de beauté vocale et visuelleDans l'intimité feutrée du Warszawska Opera Kameralna (Opéra de Chambre de Varsovie), le rideau se lève sur Giulio Cesare d'une manière qui rappelle presque une ouverture cinématographique. Les projections 3D des ruines de l'Égypte, bien que simples, plongent rapidement le public dans l'univers antique de cette épopée. L'énergie des premières scènes est soutenue par des danses vibrantes, qui, bien que bruyantes, apportent une vitalité physique à l’action, contrastant avec la majesté de l’ouverture musicale.
Yuryi Mynenko (Giulio Cesare) se distingue dès le Presti omai. Sa voix de contre-ténor, claire et puissante, donne à César une allure majestueuse, parfaitement soutenue par les danseuses qui enrichissent la scène de mouvements subtils et séduisants (Va tacito e nascosto). Mynenko restitue bien l’essence du personnage, un César à la fois séducteur et stratégique, même si on aurait souhaité davantage de moments de vulnérabilité émotionnelle.
Le véritable éclat de la soirée provient de Dorota Szczepańska dans le rôle de Cleopatra. Dès qu'elle entonne V'adoro, pupille, elle enveloppe la scène d'une lumière vocale envoûtante. Son charisme naturel et sa présence scénique magnifient chaque note, notamment dans Piangerò la sorte mia, où elle réussit à toucher profondément le public par son interprétation empreinte de tristesse et de grandeur. Elle incarne une Cleopatra à la fois puissante et fragile, dans une prestation qui transcende les petits défauts techniques de la production.
Ray Chenez en Sesto montre une voix douce et agréable, bien que quelques moments manquent de synchronisation, notamment dans Non disperar. Néanmoins, il parvient à capturer l’émotion du personnage dans ses moments de tension, surtout dans ses échanges avec Joanna Motulewicz (Cornelia). Motulewicz, quant à elle, livre une performance remarquable. Son Priva son d'ogni conforto est un des moments les plus poignants de la soirée, où la douleur et la détermination de Cornelia sont magnifiquement exprimées.
Nicholas Tamagna fait une forte impression dans le rôle de Tolomeo. Son interprétation flamboyante, notamment dans Si, spietata, il tuo rigore, apporte une dimension théâtrale vibrante au personnage, jouant à la limite entre menace et excentricité. Cela crée une belle dynamique avec les autres personnages, notamment Cornelia.
Artur Janda (Achilla) offre une performance vocale robuste. Bien que son rôle soit souvent éclipsé par les chorégraphies, sa présence apporte une force tranquille à ses scènes, en particulier dans Tu sei il cor di questo core.
La mise en scène de Włodzimierz Nurkowski réussit à moderniser cette œuvre baroque avec des touches contemporaines. Les chorégraphies, bien que parfois envahissantes, apportent un dynamisme visuel qui accompagne la musique. Les accessoires, parfois fragiles (comme ce verre de champagne cassé sur la scène) ou mal ajustés (comme cette couronne de lauriers qui ne tenait pas sur la tête de César), ajoutent malgré tout une dimension ludique, adoucissant l'intensité des conflits. Cela est particulièrement visible dans certains moments, comme le gag (involontaire ?) des pantalons de César qui tombent pendant Al lampo dell'armi, ou dans le final, où les épées se transforment en plumes.
L'orchestre, dirigé par Adam Banaszak, se distingue par sa précision et sa capacité à capter les nuances de la partition de Haendel. Les instruments d'époque apportent une authenticité sonore qui se marie bien avec les arias. Les moments comme Domero la tua fierezza et Da tempeste sont joués avec brio, donnant à l’ensemble une dynamique forte et entraînante.
La scénographie d'Anna Sekuła et les costumes raffinés renforcent l’esthétique égyptienne avec élégance, tandis que les chorégraphies de Wioletta Suska apportent un contraste énergique à l’atmosphère plus solennelle de l’opéra.
Cette production de Giulio Cesare à l'Opéra de Chambre de Varsovie parvient à équilibrer des moments de beauté vocale et visuelle, notamment grâce aux performances envoûtantes de Dorota Szczepańska et Yuryi Mynenko. Malgré quelques maladresses techniques, l'ensemble du spectacle parvient à capturer la grandeur baroque de Haendel, offrant au public une soirée riche en émotions et en moments de splendeur musicale.
Publié le 17 oct. 2024 par Pedro Medeiros