Orfeo - Monteverdi

Orfeo - Monteverdi ©François de Maleissye-Melun/ Cappella Mediterranea
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Une double révolution

Créé le 24 février 1607 au théâtre de la Cour de Mantoue, L’Orfeo signe la rencontre-fusion du théâtre et de la musique en un genre nouveau, l’opéra qui combine le recitar cantando et les diverses formes de la musique de cour. L’œuvre est aussi donnée comme un passage entre la musique de la Renaissance et la musique baroque qui va s’épanouir à Venise au milieu du XVIIe siècle.

C’est tout le talent de Leonardo García Alarcón de recréer cette double révolution que représente L’Orfeo. La Cappella Mediterranea sonne somptueusement sous sa direction dans une variété de couleurs et d’expression d’une incroyable richesse qui signent une réussite totale. Le chant est totalement intégré dans cette narration aux équilibres subtils. Le continuo est omniprésent et accompagne les émotions avec une grande intelligence et un grand sens du théâtre.

L’Orphée de Valerio Contaldo, qui maîtrise parfaitement le recitar cantando, est bouleversant, notamment dans sa longue plainte du V. Le timbre est rond, très ensoleillé et se prête à merveille à l'exposition des états d'âme du poète, de la crainte et du bonheur amoureux au désespoir de la perte en passant par l'outrecuidance de l'ivresse de la victoire.

Mariana Flores est une superbe Euridice tout au long de l’œuvre qu’elle traverse avec une forme de douce mélancolie. La voix est ronde, puissante, parfaitement projetée. En revanche, elle a montré à mon goût une expressivité excessive lors du prologue et sa Musique ne m'a pas convaincu.

Toutes deux très belles voix, chaudes et puissantes, Anna Reinhold incarne une Proserpine toute d’humaine sensualité et Coline Dutilleul est parfaite en porteuse de malheur. De même, le superbe Charon de Salvo Vitale est inquiétant et sinistre à souhait. Tous les autres interprètes de cette belle soirée sont tout à fait à la hauteur mais citons tout particulièrement la remarquable Ninfa de Julie Roset et les diverses interprétations de Nicholas Scott dont le beau timbre semble comme à l’étroit dans ces rôles de comprimari.

Enfin la réussite de cette soirée n’aurait pas été totale sans les très belles couleurs et les subtils équilibres de Cappella Mediterranea, ni sans les très belles interventions du Chœur de Chambre de Namur, tous deux dirigés d'une main ferme et précise par Leonardo Garcia Alarcón (on pourra également consulter dans ces colonnes la chronique du CD, avec les mêmes ensembles et une distribution légèrement différente, dirigés par le même chef).



Publié le 19 juil. 2022 par Jean-Luc Izard