Intégrales des Partitas pour clavecin - Johann Sebastian Bach

Intégrales des Partitas pour clavecin - Johann Sebastian Bach ©NoMadMusic. Photo NeO Tony LEE
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Le son frêle du clavecin…

Un bon nombre d’instruments baroques ont été atteints par un mal pernicieux dû à la concurrence entre eux et les instruments « modernes » en gestation. Le clavecin n’a pas échappé à cette gangrène inoculée par la naissance du piano-forte. Cependant, il a su résister aux assauts incessants du temps grâce à l’opiniâtreté d’artisans facteurs de clavecin et d’interprètes passionnés, comme Jean-Luc Ho pour ne citer que lui. En collaboration avec NoMadMusic, le claveciniste français livre ici un vibrant hommage au Cantor de Leipzig, Johann Sebastian Bach en lui consacrant un enregistrement intégral des Partitas pour clavecin. Bach est sans conteste possible un improvisateur et un virtuose hors pair du clavier. Il a composé plusieurs recueils consacrés au clavecin notamment les Inventions et Sinfonies à 2 et 3 voix entre 1720 et 1723, la première partie du Clavier bien tempéré en 1722, les Suites anglaises vers 1723, les Suites françaises en 1725 et enfin les Partitas entre 1726 et 1731, qui constituent le sommet de son art !

Le clavecin, au son agréable mais frêle est source d’envoûtement. L’intensité du son ne dépend pas de la pression exercée par les doigts sur les touches. C’est donc l’attention portée au doigté qui « instrumente » le phrasé, la respiration mélodique. Cette fragilité prend tout son sens grâce aux irrégularités rythmiques donnant vie aux répétitions, hésitations. Aucun mécanisme ne peut en découler, la phrase musicale se déroule d’une façon dynamique. Cela permet d’éviter l’écueil d’un perpétuel continuum sans âme !
C’est bien là, que réside tout le talent de ce musicien,Jean-Luc Ho investit, s’approprie les Partitas. Dès son plus jeune âge, il se passionne pour les claviers anciens. Devant les touches, il s’affranchit des contraintes en proposant une ligne mélodique dans le mouvement grâce aux variations, articulations et la rapidité d’exécution. Il est au cœur de la déclamation baroque. Les Partitas peuvent apparaître comme le creuset du mélange des styles français, italiens et allemands.
Le Cantor dote chacune de ses Partitas d’une pièce introductive à caractère propre prenant différents termes, Praeludium (Partita n°1), Sinfonia (n°2), Fantasia (n°3), Ouverture (n°4), Preambulum (n°5) et Toccata (n°6). Le maestro ose bousculer l’ordre habituel de la Suite, et son « disciple » le sert avec brio dans une grande homogénéité du timbre entre les différentes notes de la gamme chromatique. Jean-Luc Ho rend harmonieux le jeu de la main droite et celui de la main gauche, le tremblement se construit.
A l’écoute de cet enregistrement, nous pourrions même tomber dans un piège. Le rondeau de la Partita n° 2 ou les arias des Partitas n°4 et 6 ne sont pas à proprement dits des danses. Le Tempo di gavotta sert de leurre, puisqu’il ne revêt pas le caractère d’une gavotte, danse à deux temps d’origine paysanne qui ne cessa d’évoluer depuis le XVIe siècle jusqu’à la fin du XIXe siècle.

Il serait assez aisé de relever toutes les « fantaisies » signées des mains du Cantor. Mais l’écoute de cet enregistrement n’aurait plus de charme, ni de surprises.
La musique, ainsi composée et interprétée, suggère une exquise souplesse voir sensualité. Bach atteint le zénith de son art. L’astre céleste éclaire le jeu de Jean-Luc Ho. La chaleur humaine dégagée par ce jeune claveciniste inonde l’espace même si le son émanant du clavecin est si frêle !




Publié le 16 mars 2016 par Jean-Stéphane SOURD DURAND